La Fabrique de l’addiction aux jeux de hasard- Il n’y a pas de hasard dans les jeux de hasard

La Fabrique de l’addiction aux jeux d’argent – Il n’y a pas de hasard dans les jeux de hasard, est une conférence donnée par Thomas Amadieu au Gazette Café de Montpellier le 19 novembre 2022.

Le diaporama qui a servi de support à l’exposé n’est pas disponible. Les personnes désireuses d’en apprendre davantage sur l’exposé de Thomas Amadieu pourront se reporter aux documents suivants :

De plus, sa publication La fabrique de l’addiction aux jeux d’argent, Le Bord de l’eau, col. « Pour mieux comprendre », est disponible en librairie ou sur commande chez l’éditeur.

4 articles parus dans Libération (dont un tout récemment) traitent également de cette question :

  • Addiction aux paris sportifs : le double discours des opérateurs (13/11/2022)
  • 600.000 Français accros aux jeux d’argent et de hasard (16/9/2011)
  • Jeux d’argent sur Internet : l’addiction entre à la maison (7/10/2009)
  • Jeux d’argent et de hasard : quand la dépendance s’installe (16/8/2008)

II – Débat

Les contraintes de temps liées au lieu (le Gazette Café) qui a bien voulu nous accueillir pour cette séance nous ne nous ont pas permis de prolonger la discussion autant que nous l’aurions souhaité. Malgré sa brièveté, j’en rends compte avec le même souci que chaque fois : synthétiser, et parfois regrouper les propos, sans les trahir, mais sans prétendre à l’exhaustivité.

Question : pourquoi les messages dissuasifs obligatoires des opérateurs ne marchent-ils pas ? Est-ce que ceux qui sont émis par les associations sont plus efficaces ? Du reste, le volet « dissuasion » ne pourrait-il être renforcé, à l’image de ce qu’on fait pour les médicaments par exemple ?

Réponse : une explication est sans doute l’ambiguïté intrinsèque du message, qui délivre à la fois un propos principal (d’invitation à…ou de promotion de…) et un propos minimaliste de modération, au demeurant peu crédible de la part d’un organisme dont l’intérêt est patent. Une récente charte liant les opérateurs a été récemment rédigée pour dépasser ce problème. De toute façon, quand la dépendance est installée, les conseils de modération sont peu opérants (cf le tabac ou l’alcool).

Quant aux messages de dissuasion directe, ils sont souvent coûteux et sont parfois un geste fait pour témoigner d’une volonté politique plus qu’autre chose. La prévention ne fonctionne que si elle est ciblée (populations, lieux) et produites par quelqu’un dont la parole est crédible, en tout cas pas par un opérateur de jeux.

Question : les gains sont-ils imposables ?

Réponse : pas au moment de leur versement mais ils le deviennent lorsqu’ils sont utilisés (investis). Quant aux opérateurs, ils sont imposés à 50% pour les paris en ligne et toutes les mises sont taxées à 55%.

Question : Existe-t-il des jeux truqués conçus de manière à ce que les joueurs aient plus de chances de perdre ?

Réponse : tous les jeux sont conçus pour faire gagner les opérateurs. L’espérance de gain (probabilité) n’est jamais annoncée, alors que cela pourrait constituer une bonne mesure de prévention.

Question : que penser des mesures d’interdiction d’accès aux casinos ? Sont-elles efficaces ?

Réponse : on peut penser que cela rejoint des démarches d’auto-contrainte. Les réactions de rationalité froide (ce qu’on peut appeler la gueule de bois ludique) existent mais le joueur peut toujours retrouver d’autres lieux. La mesure est intéressante mais toujours contournable.

Question : qu’est-ce qui marche, en fin de compte ?

Réponse : les thérapies cognitives, le recours à des spécialistes (addictologues) existent. Mais il s’agit encore et toujours de réponses individuelles. Sue le plan collectif, la prévention doit être ciblée et conduite par des personnes crédibles

Surtout, il faut moduler l’offre pour la rendre moins addictive. De ce point de vue, l’ouverture à la concurrence a posé ipso facto le problème du contrôle. Amigo, de la FDJ, a espacé les tirages en pour éviter l’effet addictif d’une trop grande fréquence de jeux et de gains (même minimes).

Remarque : on ne peut manquer d’évoquer une carence éducative du côté de certains parents, qui laissent faire, voire qui fournissent à leurs enfants les moyens limités de jouer régulièrement, pensant ainsi les mettre à l’abri de l’addiction.

Réponse : le jeu est interdit aux mineurs. (Cf : https://anj.fr/jouer-en-toute-securite/proteger-les-mineurs). Mais toute interdiction peut être contournée plus ou moins ouvertement. Cf par exemple les coffrets de Noël de la FDJ.

Remarque de conclusion, en forme de boutade : peut-être même que la tirelire est-elle un premier pas vers l’addiction ?

Notes de Jean-Luc Bernet